Comment trouver un poste d'Happiness Manager, avec Arnaud Collery [2/3]
2ème partie de notre interview avec Arnaud Collery, Chief Happiness Officer, coach, fondateur d'une agence d'Happiness, conférencier, auteur du livre "Mister Happiness" (disponible ici), et organisateur de l'événement "Stand up for Passion". À travers cette interview, Arnaud nous parle de son parcours et des différentes étapes qui l'ont amenés à devenir Chief Happiness Officer et à transmettre cette passion pour l'humain au plus grand nombre !
Vous pouvez retrouver la première partie de l'interview ici.
Si tu étais Happiness Manager et que tu souhaitais faire une candidature spontanée dans une entreprise, entreprise qui n’aurait forcément conscience de l’importance de l’« Happiness », que lui dirais-tu ?
La première chose là-dessus, c’est que si tu veux postuler en tant qu’Happiness manager, il ne faut pas y aller au hasard. Il faut cibler. Il faut plutôt se concentrer sur les gens avec lesquels on souhaite travailler. Et ça, ça suppose des centaines d’heures à faire de la veille sur Linkedin, à regarder des vidéos, les profils des gens que tu apprécies. Il faut trouver le manager que tu aimes bien. On se fout de l’âge, de ce qu’ils font, de la boîte dans laquelle ils sont. L’important, c’est que ce soit gens humanistes. Il faut trouver des gens qui ont cette passion pour les humains, cette passion pour l’autre, pour la transformation et la connaissance, puis cibler ces personnes. Il faut trouver des relations en commun avec ces gens, leur envoyer des invitations Linkedin , puis les « attaquer », mais de façon gentille. Tu envoies du contenu, des articles, des vidéos, qui montre ta passion pour l’autre. C’est ça un Happiness Manager : quelqu’un qui a une passion pour l’autre, pour l’énergie positive et pour la connexion.
On me dit souvent « je n’arrive pas à convaincre tel boss de me recruter en tant qu’Happiness Manager ». Je conseille de tout simplement de passer à autre chose : en France, il y a des milliers de boîtes sensibles à l’Happiness Management. C’est peut-être seulement 10% des boîtes françaises, certes. Mais 10% des boîtes françaises, ça représente déjà beaucoup. Pour l’instant, je ne sais pas exactement combien il y a d’Happiness Manager en France. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a encore beaucoup de places libres.
Si tu es dans une boîte où la personne au-dessus de toi hiérarchiquement, ne comprend absolument rien à cela, quitte la boîte et donnes-toi comme objectif de trouver l’entreprise, la ville, le pays dans lequel tu pourras travailler avec quelqu’un qui est aligné avec toi. Avec le temps, j’ai appris qu’il est inutile de chercher à convaincre. Un vendeur, lui doit convaincre. Mais en tant que Chief Happiness Officer, notre but, c’est de partager des émotions.
Pour toi ce n’est donc pas une histoire d’entreprise, mais plutôt de personne
C’est ça. Dans n’importe quel boulot, ce n’est pas de skills ou des connaissances que l’on vend à l’entreprise. On recherche avant tout des personnes avec les mêmes valeurs que soi. In fine, les gens qui nous engagent ont les mêmes valeurs profondes. C’est pour cela que les différents corps de métier, comme les financiers par exemple, se ressemblent. Dans le monde de la finance, c’est clair qu’il y a moins de Chief Happiness Officer que dans d’autres secteurs. Propager le bonheur et partager les émotions, ce n’est pas le truc premier dans la finance. La finance, c’est quelque chose d’important, j’ai même commencé les premières années de ma carrière là-dedans. Sauf que quand je parlais d’émotions ou d’aider les gens, on me riait au nez. J’ai compris très vite que ce n’était pas ma place, que je ne pouvais pas rester tout en étant 100% moi-même. Et pourtant, j’étais passionné intellectuellement par les mouvements économiques.
Encore une fois, il faut trouver les personnes autours de toi qui vont comprendre ce besoin « d’accélérer les valeurs humaines ». Et pour ça, il y a assez de gens, tous secteurs confondus, même s’il y a des secteurs qui recrutent moins que d’autres.
Pour ce qui est de la méthode à appliquer, moi je conseille toujours la méthode Américaine : tu rentres dans la boîte gratuitement. Personne ne te refusera si tu travailles gratuitement. C’est ce que j’ai fait quand j’ai commencé ce métier à 40 ans, ce qui quelque part est vieux. Pendant 6 mois, j’ai travaillé gratuitement dans plusieurs boîtes, je n’ai pas rentré un seul dollar. Je savais qu’il fallait que je fasse mes preuves. Ensuite, j’ai pu aller voir d’autres boîtes pour leur parler de mes expériences et de mes réussites (bien sûr, je n’ai pas précisé que je n’étais pas payé). C’est comme ça que par la suite, des boîtes m’ont payé pour ce métier. En France, c’est la même démarche qu’aux États-Unis, même si quand je dis ça, on me regarde parfois avec des gros yeux et on me dit « non, ce n’est pas possible de ne pas être payé etc… ». Mais si c’est possible. C’est possible de ne pas être payé quand tu sais que c’est ta voie, ta mission de vie. Moi à l’époque, je savais exactement où je voulais être dans 5 ans : organiser des TedX, faire un talk à Harvard etc… Je ne savais pas comment, mais je savais que j’allais le faire. En France on essaye surtout de trouver le processus et la manière d’arriver à un terme. Les Américains ne sont pas bons en tout, mais là où ils sont forts, c’est dans l’aptitude de se mettre en vision. Visualiser où on veut arriver, et trouver un moyen d’y parvenir.
C’est exactement ce principe qu’il faut avoir quand on veut devenir Chief Happiness Officer. Le tout, c’est d’être en accord avec soi-même. Je ressens très clairement que le besoin d’avoir des personnes humanistes au sein des entreprises sera toujours là. On était moins de 20 Chief Happiness Officer il y a encore 5 ans. Aujourd’hui, si tu comptes tous les Happiness Manager, Happinness Officer, Chief Happiness Officer, ou encore Welfare Officer (il y a plus d’une dizaine de dénominations), on est 5000 à travers le monde. En 5 ans, on est passé de 20 à 5000. C’est un truc de dingue.
Justement, comment expliques-tu que vous êtes beaucoup plus qu’auparavant ? Est-ce une évolution de la société ? La notion d’Happiness est-elle davantage prise au sérieux ? Est-ce dû à l’apparition des nouvelles générations sur le monde du travail ?
Pour moi, on peut voir l’explication du côté du System Thinking. Le System Thinking, c’est ce qu’utilisent les futuristes. Le rôle des futuristes est de comprendre comment va évoluer un métier donné. Avec le System Thinking, les futuristes trouvent les conséquences d’une corrélation de plusieurs domaines. Ils observent ce qu’il se passe dans un domaine, croisent avec un autre domaine, puis font des hypothèses sur ce qu’il va se passer dans 3, 5 ou 10 ans. C’est comme ça que l’on peut expliquer cette demande de Chief Happiness Officer aujourd’hui. C’est une conséquence de plusieurs choses.
Effectivement, il y a l’arrivée des millenials et des générations suivantes. Je pense que c’est vraiment les moins de 32 ans qui feront le monde de demain. Et les moins de 32 ans veulent de l’impact tout de suite, ils veulent se marrer, ils ne veulent plus s’ennuyer.
Il y a aussi la société qui a changé avec l’ubérisation. Les gens n’ont plus ce besoin de posséder, d’être propriétaire d’une maison, d’une voiture etc… Aujourd’hui, on loue les voitures, les appartements etc…
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Il y a aussi le changement des méthodes de travail qui a un impact sur cette notion d’Happiness ?
Complètement. J’étais à une conférence il y a quelques jours sur le futur de l’humain et du travail. Le patron d’Unilever décrivait le futur du travail, en disant que dans 5 à 10 ans, les sociétés mettront en place des systèmes où tu seras membre de la boîte. La notion de CDI ne voudra plus rien dire. Dans 10 ans, les jeunes qui arriveront sur le marché du travail s’en ficheront du CDI, ce ne sera plus le sésame. À la place, tu seras membre d’une communauté. Tu travailles quelques mois dans une communauté, puis dans une autre, avec plusieurs en même temps… Tout ça pour dire que dans le monde de demain, on va tous appartenir à différentes communautés, qui vont se rejoindre, se refaire. Il n’y aura plus de choses fixes.
Dans 5 à 10 ans, ce phénomène de communauté va représenter quelque chose comme 30% de la population. Des gens qui vont être un peu en mode Freelance : 2 jours par semaine dans une entreprise, 2 jours par semaine dans un autre, puis 1 mois par an où tu deviens aventurier au Népal par exemple. En tant que Chief Happiness Officer, tout ça me passionne. Dans mon livre, un des mots-clés, c’est la réinvention, la perpétuelle réinvention.
Mais, la plupart des plus de 40 ans ne comprennent pas cela. J’ai beaucoup d’amis qui sont complément perdus. Les enfants d’aujourd’hui, tout ça, ce sera leur vie plus tard. De se réinventer en permanence. Aujourd’hui l’employé moyen s’est réinventé environ 1 fois, voire zéro fois. Demain les gens vont se réinventer 5 ou 6 fois minimum. Et quand je dis se réinventer, ce n’est pas changer de boîte ou de ville. C’est complètement se réinventer. C’est apprendre un nouveau métier.